Stone Town, cette perle de l’océan Indien nichée sur l’île de Zanzibar en Tanzanie, représente bien plus qu’une simple destination touristique. Classée au patrimoine mondial de l’UNESCO depuis 2000, cette vieille ville swahilie incarne plusieurs siècles d’histoire commerciale, culturelle et architecturale exceptionnelle. Avec ses ruelles labyrinthiques, ses portes sculptées emblématiques et son atmosphère envoûtante, Stone Town attire chaque année des milliers de voyageurs en quête d’authenticité. La cité historique tire son nom des imposantes constructions en pierre de corail qui caractérisent son paysage urbain, un matériau extrait directement des récifs environnants et utilisé depuis le XIXe siècle.
Lorsque vous déambulez dans ses venelles sinueuses, vous plongez immédiatement dans un univers où le temps semble s’être arrêté. Les façades patinées par les embruns marins racontent des histoires de sultans omanais, de marchands d’épices venus d’Inde, de navigateurs portugais et de l’influence britannique coloniale. Cette fusion culturelle unique se reflète dans chaque recoin de la ville, créant une ambiance particulière que l’on ne retrouve nulle part ailleurs sur le continent africain. Les chiffres parlent d’eux-mêmes : Stone Town compte plus de 1 700 bâtiments historiques recensés, dont environ 500 portes traditionnelles sculptées, véritables chefs-d’œuvre artisanaux qui font la renommée mondiale de la cité.
La meilleure période pour explorer Stone Town s’étend de juin à octobre, pendant la saison sèche, lorsque les températures oscillent entre 25 et 28 degrés Celsius. Cette fenêtre climatique idéale permet de profiter pleinement des visites culturelles sans la contrainte des pluies tropicales. Cependant, même pendant la saison humide de mars à mai, la ville conserve tout son charme, avec des averses généralement brèves en fin de journée qui rafraîchissent l’atmosphère et laissent place à des couchers de soleil spectaculaires sur l’océan.
Sommaire
ToggleUn patrimoine architectural fascinant
L’architecture de Stone Town constitue un véritable livre ouvert sur l’histoire maritime de l’océan Indien. Les influences arabes, persanes, indiennes et européennes se mélangent harmonieusement pour créer un style architectural unique appelé le style swahili-arabe. Les bâtiments typiques comportent des cours intérieures fraîches, des balcons en bois sculpté appelés « barazas », et ces fameuses portes monumentales qui font la fierté de leurs propriétaires. Chaque porte raconte une histoire : les motifs de chaînes indiquaient que le propriétaire était marchand, les poissons symbolisaient la prospérité, tandis que les lotus représentaient la pureté.
Le Palais des Merveilles (Beit-el-Ajaib) domine majestueusement le front de mer. Construit en 1883 par le sultan Barghash bin Said, ce fut le premier bâtiment d’Afrique de l’Est à disposer de l’électricité et d’un ascenseur. Avec ses trois étages, ses colonnes imposantes et sa tour de l’horloge visible de loin en mer, il servait autrefois de palais cérémoniel pour impressionner les visiteurs étrangers. Malheureusement, une partie du bâtiment s’est effondrée en 2020, mais les autorités travaillent activement à sa restauration pour préserver ce joyau architectural qui accueillait auparavant un musée fascinant sur la culture et l’histoire swahilie.

La Maison des Merveilles n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. Le Vieux Fort (Ngome Kongwe), construit par les Omanais entre 1698 et 1701 sur les ruines d’une ancienne église portugaise, témoigne des conflits qui ont marqué la région. Ses murailles épaisses abritent aujourd’hui un centre culturel vivant où se produisent régulièrement des spectacles de danse traditionnelle et des concerts. Non loin de là, la Maison d’Héritage (Héritage House) offre aux visiteurs un aperçu remarquable de la vie quotidienne d’une famille aisée de Stone Town au XIXe siècle, avec son mobilier d’époque, ses objets domestiques et ses photographies anciennes qui permettent de visualiser concrètement le passé glorieux de la cité.
Les bains persans de Hamamni, datant de la fin du XIXe siècle, représentent les seuls bains publics encore visibles en Afrique de l’Est. Le sultan Barghash les fit construire en 1870 pour offrir à sa population un lieu de purification conforme aux traditions islamiques. Ces bains, avec leurs dômes caractéristiques et leurs systèmes ingénieux de circulation d’eau chaude et froide, démontrent le niveau de sophistication atteint par la civilisation swahilie. Bien qu’ils ne soient plus en activité depuis les années 1920, leur visite permet de comprendre l’importance accordée à l’hygiène et aux rituels sociaux dans la culture zanzibarite.
Les marchés et l’effervescence commerciale 🏪
Le marché de Darajani constitue le cœur battant de Stone Town, un lieu où tous les sens sont sollicités simultanément. Dès l’aube, les pêcheurs déchargent leurs prises nocturnes sur le marché aux poissons adjacent, créant une animation extraordinaire où les enchères se font à la criée dans un mélange de swahili et d’anglais. Les étals débordent de thons, de capitaines, de poulpes fraîchement capturés et de ces langoustes impressionnantes qui font la réputation gastronomique de Zanzibar. L’atmosphère vibrante du marché, avec ses négociations animées et ses cris de vendeurs, offre une expérience immersive authentique loin des circuits touristiques aseptisés.
À l’intérieur du bâtiment principal du marché, construit en 1904, on découvre un dédale de stands proposant fruits tropicaux, légumes, épices et produits artisanaux. Les pyramides colorées de mangues, papayes, fruits de la passion et durians côtoient les présentations soignées de cannelle, cardamome, clous de girofle et safran. Zanzibar fut surnommée les « îles aux épices » au XIXe siècle, produisant jusqu’à 90% des clous de girofle mondiaux, et cette tradition épicière reste très présente dans l’économie locale. Les marchands vous proposeront volontiers de sentir leurs produits, de goûter un morceau de gingembre frais ou de découvrir les propriétés médicinales du curcuma local.

Le quartier commerçant s’étend bien au-delà du marché central, avec la rue Gizenga particulièrement animée où se concentrent les boutiques de tissus colorés appelés « kangas » et « kikoys ». Ces pièces de coton imprimé comportent toujours un proverbe swahili inscrit sur le bord, transformant chaque tissu en vecteur de messages philosophiques ou humoristiques. Les femmes zanzibaries choisissent méticuleusement leurs kangas en fonction du message qu’elles souhaitent transmettre à leur entourage, créant ainsi un langage textile unique. Certaines boutiques familiales existent depuis quatre générations, transmettant de mère en fille les techniques de négociation et la connaissance approfondie des textiles.
Les sites historiques incontournables
La Cathédrale anglicane de Christ Church, achevée en 1887, s’élève symboliquement à l’emplacement exact de l’ancien marché aux esclaves de Stone Town. Cette construction voulue par l’évêque Edward Steere marque la fin officielle du commerce des esclaves dans la région, aboli en 1873 après des décennies de pression britannique. L’autel de la cathédrale est placé précisément où se trouvait le poteau de flagellation, transformant un lieu de souffrance en symbole d’espoir et de rédemption. Le style architectural néogothique tranche avec l’environnement arabo-swahili environnant, créant un contraste visuel saisissant qui rappelle la complexité de l’histoire coloniale.
Sous la cathédrale, les chambres souterraines où étaient entassés les esclaves avant leur vente sont désormais accessibles aux visiteurs dans le cadre d’un mémorial poignant. Ces espaces exigus et oppressants, où jusqu’à 75 personnes pouvaient être confinées simultanément dans des conditions inhumaines, offrent une confrontation émotionnelle avec les horreurs du commerce triangulaire. Selon les estimations historiques, plus de 600 000 esclaves transitèrent par Zanzibar au XIXe siècle, principalement en provenance du continent africain pour être vendus vers le Moyen-Orient, l’Inde et les Mascareignes. La visite de ce site reste essentielle pour comprendre les fondements économiques sur lesquels Stone Town s’est développée.

Le Palais du Sultan (Beit el-Sahel) permet d’explorer l’opulence dans laquelle vivait la famille royale omanaise qui régna sur Zanzibar de 1840 à 1964. Transformé en musée, il expose des meubles d’époque, des photographies de sultans successifs, des vêtements traditionnels et des objets personnels qui humanisent ces figures historiques. On y découvre notamment l’histoire fascinante de la princesse Salme, fille du sultan Said, qui scandalisa la cour en s’enfuyant avec un marchand allemand en 1866 et publia plus tard ses mémoires, offrant un témoignage rare sur la vie dans le harem royal.
L’expérience gastronomique zanzibarite 🍽️
La cuisine de Stone Town reflète parfaitement le melting-pot culturel de l’île, fusionnant influences swahilies, arabes, indiennes et persanes dans des créations culinaires uniques. Les restaurants de Forodhani Gardens, le jardin public situé face à l’océan, se transforment chaque soir en un marché alimentaire nocturne spectaculaire. Dès 18 heures, des dizaines de vendeurs installent leurs stands mobiles éclairés par des lampes à gaz, créant une ambiance festive où résidents et touristes se mélangent autour de spécialités locales à des prix très abordables, généralement entre 2 et 5 dollars par plat.
La spécialité absolue reste la pizza zanzibarite, une création locale qui n’a pratiquement rien à voir avec son homonyme italienne. Préparée sur une plaque chauffante, cette crêpe épaisse reçoit une garniture de légumes, viandes, fromage, parfois des fruits, puis est repliée en carré et cuite jusqu’à obtenir une texture croustillante. Le vendeur découpe ensuite la pizza en portions qu’il arrose généreusement de mayonnaise pimentée et de sauce tamarind, créant un équilibre savoureux entre sucré, salé et épicé. Les brochettes de fruits de mer fraîchement grillées, notamment les calamars et les langoustines badigeonnées de jus de citron vert, constituent l’autre attraction majeure de Forodhani, avec une fraîcheur garantie puisque les produits proviennent directement du marché aux poissons voisin.

Pour une expérience plus raffinée, le restaurant Emerson Spice, installé dans une ancienne demeure swahilie rénovée avec goût, propose une cuisine fusion zanzibarite contemporaine sur sa terrasse panoramique. Le coucher de soleil y est spectaculaire, avec une vue à 360 degrés sur les toits de Stone Town et l’océan Indien. Le menu change quotidiennement selon les arrivages du marché, mais on y retrouve régulièrement des classiques revisités comme le pilau aux fruits de mer (riz parfumé aux épices locales), le poisson en croûte de noix de coco, ou le curry de poulpe parfumé à la cardamome. Comptez environ 40 à 60 dollars par personne pour un repas complet avec boissons, un tarif justifié par la qualité exceptionnelle des produits et l’expérience mémorable.
Le café Mercury’s, situé dans une ruelle tranquille près de la maison natale de Freddie Mercury, offre une pause rafraîchissante avec ses jus de fruits tropicaux pressés minute et ses pâtisseries swahilies. Les mandazi (beignets légèrement sucrés parfumés à la cardamome), les samosas végétariens et les kashata (friandises au coco et cacahuètes) accompagnent parfaitement un café zanzibarite corsé. L’établissement rend hommage au célèbre chanteur de Queen, né Farrokh Bulsara à Stone Town en 1946, avec des photographies d’époque et des anecdotes sur son enfance dans l’archipel avant le départ de sa famille pour l’Angleterre.
Se perdre dans les ruelles historiques
L’exploration à pied de Stone Town constitue une aventure quotidienne où il devient pratiquement impossible de ne pas se perdre dans le dédale de venelles étroites. Cette désorientation fait partie intégrante du charme de la ville et permet des découvertes inattendues : une porte sculptée particulièrement belle, un artisan fabriquant des sandales en cuir de chameau, un groupe d’enfants jouant au football dans un espace minuscule, ou un chat endormi sur un balcon ombragé. Les ruelles les plus étroites ne mesurent parfois qu’un mètre de large, obligeant les scooters et les rares voitures à avancer prudemment en klaxonnant régulièrement.
Le quartier de Shangani, situé dans la pointe ouest de Stone Town, offre une concentration exceptionnelle de bâtiments coloniaux bien préservés et de villas swahilies élégantes. C’est là que résidaient autrefois les riches marchands indiens et arabes, et l’architecture témoigne de cette prospérité passée avec des façades ornementées, des balcons en saillie et des cours intérieures plantées de bougainvilliers. Le front de mer de Shangani propose également plusieurs restaurants avec terrasses face à l’océan, parfaits pour observer les pêcheurs rentrant avec leurs prises ou les boutres traditionnels glissant silencieusement sur les eaux turquoise.

Le quartier de Mkunazini, moins touristique, révèle la vie quotidienne authentique des habitants de Stone Town. Les femmes y discutent assises sur les « barazas » (bancs en pierre devant les maisons), les hommes jouent aux dominos dans les cafés locaux, et les échoppes vendent des produits du quotidien sans concession au tourisme. C’est dans ces zones résidentielles que l’on comprend vraiment le fonctionnement d’une communauté urbaine swahilie, avec ses mosquées de quartier où l’appel à la prière résonne cinq fois par jour, ses écoles coraniques où les enfants apprennent l’arabe, et ses petits commerces familiaux transmis de génération en génération.
Les bonnes adresses pour séjourner
L’offre d’hébergement à Stone Town s’est considérablement développée ces dernières années, avec une multiplication des maisons d’hôtes de charme installées dans des demeures historiques restaurées. L’Emerson on Hurumzi occupe deux bâtiments swahilis du XIXe siècle magnifiquement rénovés, offrant des chambres décorées avec authenticité où chaque meuble raconte une histoire. Les plafonds sculptés, les lits à baldaquin en bois de teck, les salles de bains équipées de baignoires anciennes sur pieds créent une atmosphère romantique exceptionnelle. Les tarifs commencent à environ 150 dollars la nuit en basse saison, incluant un petit-déjeuner copieux servi sur la terrasse avec vue panoramique.
Pour les budgets plus modestes, le Zanzibar Coffee House propose des chambres confortables dans un emplacement idéal près du front de mer, à partir de 80 dollars la nuit. Cet établissement familial offre un excellent rapport qualité-prix avec des chambres propres climatisées, une terrasse accueillante et un personnel attentionné qui prodigue volontiers des conseils pour organiser vos visites. Le petit-déjeuner continental, servi avec du café fraîchement torréfié provenant des plantations de l’intérieur de l’île, permet de bien commencer la journée avant de partir explorer la vieille ville.
Les routards apprécieront particulièrement le Flamingo Guest House, une auberge de jeunesse située dans une ruelle calme, proposant des dortoirs à partir de 15 dollars et des chambres doubles privatives à 35 dollars. L’atmosphère conviviale favorise les rencontres entre voyageurs, et le personnel organise régulièrement des excursions groupées vers les îles environnantes ou les plantations d’épices, permettant de réduire les coûts en partageant les transports. La terrasse commune devient chaque soir un lieu d’échanges où les voyageurs partagent leurs découvertes et leurs recommandations.
Organiser ses excursions depuis Stone Town ⛵
Stone Town constitue le point de départ idéal pour explorer l’ensemble de l’archipel de Zanzibar. L’excursion sur l’île Prison (Changuu Island), située à seulement 30 minutes en bateau, permet d’observer les tortues géantes d’Aldabra qui peuplent l’îlot depuis qu’un gouverneur britannique en fit don à la fin du XIXe siècle. Certaines de ces tortues centenaires pèsent plus de 200 kilos et acceptent volontiers la nourriture offerte par les visiteurs. L’île dispose également d’une plage de sable blanc bordée de coraux où le snorkeling révèle une vie sous-marine colorée avec des poissons-papillons, des poissons-anges et parfois des tortues marines.

Les tours des épices constituent une activité incontournable pour comprendre l’économie historique de Zanzibar. Ces excursions d’une demi-journée vous emmènent dans les plantations rurales situées à 20-30 minutes de Stone Town, où des guides expérimentés vous font découvrir la culture du clou de girofle, de la cannelle, de la vanille, du poivre, de la noix de muscade et de nombreuses autres épices. Vous apprendrez à distinguer les plants, à reconnaître les parfums, et découvrirez les utilisations médicinales traditionnelles de chaque épice. La plupart des tours incluent un déjeuner typique swahili préparé avec les épices fraîchement cueillies, offrant une expérience gustative mémorable à environ 30 dollars par personne.
Les plages paradisiaques de Nungwi et Kendwa, situées au nord de l’île à environ une heure de route, attirent les visiteurs en quête de farniente et d’activités nautiques. Ces stations balnéaires proposent du snorkeling, de la plongée sous-marine pour explorer les récifs coralliens, du kitesurf et des croisières au coucher du soleil sur des boutres traditionnels. Cependant, de nombreux voyageurs choisissent de consacrer plusieurs jours à Stone Town avant de rejoindre les plages, car la richesse culturelle et historique de la vieille ville mérite largement qu’on y consacre au moins trois à quatre jours complets pour vraiment s’imprégner de son atmosphère unique.
- 07/11/2025
- Par : OutWild
- Magazine :Tanzanie, Voyage
- Étiquettes : architecture zanzibarite, marché Darajani, patrimoine UNESCO Tanzanie, Stone Town hébergement, Stone Town Zanzibar, vieille ville swahilie, visiter Stone Town, voyage Zanzibar
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