Rome. Rien que ce nom évoque des images de ruelles pavées, de fontaines baroques et de trattorias où le temps semble s’être arrêté. Mais derrière la carte postale se cache une réalité quotidienne que tout expatrié doit appréhender avant de franchir le pas. S’installer dans la Ville Éternelle représente bien plus qu’un simple changement d’adresse : c’est une immersion totale dans un mode de vie méditerranéen, avec ses charmes indéniables et ses défis administratifs parfois déconcertants.
Chaque année, des milliers de Français, Belges et Suisses choisissent Rome comme nouvelle terre d’accueil. Les raisons ? Un climat ensoleillé presque toute l’année, une gastronomie incomparable, un patrimoine culturel sans égal et, avouons-le, cette dolce vita qui fait rêver bien au-delà des Alpes. Pourtant, réussir son expatriation romaine demande une préparation minutieuse et une bonne dose de patience face à une bureaucratie qui peut dérouter même les plus organisés.
Les démarches administratives essentielles
L’installation en Italie commence invariablement par un marathon bureaucratique qu’il vaut mieux anticiper. La première étape consiste à obtenir votre codice fiscale, l’équivalent du numéro de sécurité sociale français. Sans ce précieux sésame, impossible d’ouvrir un compte bancaire, de signer un bail ou même de souscrire un abonnement téléphonique. Vous l’obtiendrez gratuitement auprès de l’Agenzia delle Entrate, souvent en une seule visite si vous vous présentez avec votre passeport et un justificatif de domicile.
Pour les citoyens européens, la liberté de circulation simplifie considérablement les choses. Vous disposez de trois mois pour vous installer tranquillement avant de devoir déclarer votre présence. Passé ce délai, il faudra demander votre certificato di residenza auprès de la mairie du quartier (municipio) où vous résidez. Cette démarche implique généralement la visite d’un agent de police municipale à votre domicile pour vérifier que vous y habitez réellement – une formalité qui peut prendre plusieurs semaines.
L’inscription à l’Anagrafe (registre de la population) constitue une étape cruciale souvent sous-estimée. Elle conditionne votre accès au système de santé public italien (Servizio Sanitario Nazionale), réputé pour sa qualité mais parfois saturé dans les grandes villes. Prévoyez un dossier complet : pièce d’identité, codice fiscale, contrat de location enregistré et parfois une preuve de revenus suffisants. Les autorités italiennes apprécient particulièrement les dossiers bien préparés et les documents traduits par un traducteur assermenté.

Trouver un logement à Rome
Le marché immobilier en Italie présente des particularités qui peuvent surprendre les nouveaux arrivants. Les loyers ont considérablement augmenté ces dernières années, particulièrement dans les quartiers centraux comme Trastevere, Monti ou Prati. Comptez entre 800 et 1500 euros mensuels pour un appartement d’une chambre dans ces zones prisées, tandis que les quartiers périphériques comme Ostiense ou San Lorenzo offrent des alternatives plus abordables autour de 600-900 euros.
La recherche d’appartement passe généralement par les agences immobilières (agenzie immobiliari) ou les plateformes en ligne comme Immobiliare.it et Idealista. Méfiez-vous des arnaques, particulièrement fréquentes dans les annonces trop belles pour être vraies. Ne versez jamais d’argent avant d’avoir visité physiquement le logement et rencontré le propriétaire. Les agences facturent généralement des frais équivalent à un mois de loyer, une pratique standard qu’il faut anticiper dans votre budget.
Le contrat de location italien (contratto di affitto) doit impérativement être enregistré officiellement auprès de l’administration fiscale dans les trente jours suivant la signature. Ce n’est pas qu’une formalité : un contrat non enregistré vous prive de toute protection légale et vous empêche d’obtenir votre résidence. Deux formules dominent : le contratto libero (4+4 ans) et le contratto concordato (3+2 ans), ce dernier offrant des avantages fiscaux mais étant plafonné en termes de loyer.
Les propriétaires romains demandent généralement une caution équivalente à deux ou trois mois de loyer, plus le premier mois payable d’avance. Si vous n’avez pas encore d’historique professionnel en Italie, certains exigeront une garantie supplémentaire ou la présence d’un garant italien. Les expatriés en CDI ou avec des revenus stables à l’étranger peuvent présenter leurs trois dernières fiches de paie et un contrat de travail pour rassurer les bailleurs.

S’adapter au marché du travail italien
Travailler à Rome implique de comprendre un environnement professionnel aux codes parfois très différents de ceux du nord de l’Europe. Les relations humaines y occupent une place centrale : le networking, les recommandations et le bouche-à-oreille restent des leviers essentiels pour décrocher un emploi intéressant. LinkedIn est utilisé, certes, mais les contacts directs et les présentations personnelles conservent une importance capitale dans la culture professionnelle italienne.
Les secteurs qui recrutent des expatriés incluent principalement le tourisme, l’hôtellerie, la restauration, l’enseignement des langues et les organisations internationales présentes dans la capitale (FAO, PAM, etc.). Les profils bilingues ou multilingues sont particulièrement recherchés, notamment dans les startups romaines en plein développement et les entreprises internationales installées dans les quartiers d’affaires comme l’EUR. Le secteur digital connaît aussi une belle croissance, attirant de jeunes talents européens.
Les salaires italiens peuvent paraître décevants comparés aux standards français ou suisses. Un jeune diplômé débutera souvent autour de 1200-1500 euros nets mensuels, tandis qu’un cadre expérimenté peut espérer entre 2500 et 4000 euros selon le secteur. Le coût de la vie romain reste néanmoins inférieur à Paris ou Genève, ce qui compense partiellement cet écart. La fiscalité italienne prévoit également des avantages pour les travailleurs hautement qualifiés qui s’installent dans le pays, avec une imposition réduite les premières années.
Pour les travailleurs indépendants, le statut de partita IVA (numéro de TVA) s’impose. Son ouverture reste gratuite mais implique des obligations comptables et fiscales strictes. Beaucoup d’expatriés choisissent de se faire accompagner par un commercialista (expert-comptable) pour naviguer dans les méandres de l’administration fiscale italienne. Les cotisations sociales pour les indépendants peuvent représenter un choc : comptez environ 25-35% de vos revenus annuels.

La vie quotidienne et l’intégration culturelle
Vivre à Rome, c’est accepter d’adopter un rythme méditerranéen où la pause déjeuner s’étire volontiers jusqu’à 15h et où les dîners commencent rarement avant 21h. Les magasins ferment souvent entre 13h et 16h, une tradition qui perdure malgré la modernisation progressive de la ville. Cette temporalité déconcertante au début devient rapidement un art de vivre apprécié, permettant de profiter pleinement de chaque repas et de préserver un équilibre entre vie professionnelle et personnelle.
L’apprentissage de l’italien s’avère indispensable pour une intégration réussie. Si l’anglais fonctionne dans les zones touristiques, la vie administrative, professionnelle et sociale nécessite une maîtrise au moins conversationnelle de la langue de Dante. Les Romains apprécient sincèrement les efforts linguistiques des étrangers et se montrent généralement patients et encourageants face aux approximations grammaticales. De nombreuses écoles proposent des cours du soir, et les échanges linguistiques (tandem) fleurissent dans les bars du Trastevere ou de Testaccio.
Le système de transports publics romains suscite des sentiments mitigés chez les expatriés. Le métro, avec ses trois lignes principales, reste limité comparé aux réseaux parisien ou londonien. Les bus, omnipotents mais parfois imprévisibles, constituent l’épine dorsale des déplacements urbains. Un abonnement mensuel coûte 35 euros et inclut métro, bus et tramways – un tarif plutôt attractif. Beaucoup d’expatriés optent pour le vélo ou le scooter, malgré une circulation romaine légendairement chaotique qui demande un temps d’adaptation.
Les aspects pratiques méritent attention :
- Santé : Inscrivez-vous auprès d’un médecin généraliste (medico di base) dans votre quartier, service gratuit une fois votre résidence obtenue
- Banque : Les principales banques italiennes (UniCredit, Intesa Sanpaolo, BNL) proposent des services en anglais dans leurs agences centrales
- Téléphonie : TIM, Vodafone et WindTre offrent des forfaits compétitifs autour de 10-20 euros mensuels avec données illimitées
- Courses : Les marchés de quartier (mercati rionali) restent imbattables pour les produits frais et l’ambiance authentique
- Électricité et gaz : Anticipez des factures élevées en été (climatisation) et en hiver (chauffage souvent au gaz)
Les quartiers où s’installer selon vos priorités
Choisir son quartier romain influence considérablement votre expérience d’expatrié. Le centre historique (centro storico) et ses extensions comme Monti ou Trastevere séduisent par leur beauté architecturale et leur effervescence culturelle, mais les loyers y atteignent des sommets et le tourisme de masse peut lasser rapidement. Ces zones conviennent parfaitement aux célibataires ou couples sans enfants recherchant une immersion totale dans l’atmosphère romaine.

Les quartiers résidentiels comme Prati, près du Vatican, ou Parioli au nord attirent les familles d’expatriés. Ils offrent une qualité de vie supérieure, des écoles internationales à proximité et un environnement plus calme, tout en restant bien connectés au centre. Les loyers y demeurent élevés mais justifiés par la tranquillité et les commodités. Testaccio et Ostiense représentent d’excellents compromis : authentiques, moins touristiques, avec une vie de quartier préservée et des prix plus abordables.
Pour les budgets serrés ou ceux qui privilégient l’espace, les quartiers périphériques comme San Giovanni, Appio Latino ou même certaines zones de l’EUR méritent considération. Bien desservis par le métro, ils permettent d’accéder à des appartements plus spacieux pour des loyers raisonnables. La contrepartie ? Moins de charme immédiat et des trajets quotidiens plus longs vers le centre, mais une vie locale authentique loin des circuits touristiques.
Budget mensuel et coût de la vie
Établir un budget réaliste conditionne la réussite de votre installation romaine. Un célibataire peut vivre correctement avec 1500-2000 euros mensuels en faisant attention, tandis qu’un couple sans enfants devrait prévoir au minimum 2500-3000 euros. Une famille avec enfants verra ce budget grimper à 3500-4500 euros selon les choix de logement et de scolarité.
Les dépenses alimentaires restent raisonnables si vous cuisinez et privilégiez les marchés locaux plutôt que les supermarchés. Comptez 250-400 euros mensuels pour une personne seule. Les restaurants peuvent rapidement grever un budget : un repas simple en trattoria coûte 15-25 euros, tandis qu’un dîner dans un établissement correct avoisine 40-60 euros par personne. Heureusement, la culture de l’aperitivo permet de grignoter copieusement pour le prix d’un verre entre 18h et 21h.
Les frais de santé dépendent de votre situation. Le système public italien offre une couverture correcte mais avec des délais d’attente parfois longs pour les spécialistes. Beaucoup d’expatriés souscrivent une assurance privée complémentaire (50-150 euros mensuels) garantissant un accès rapide aux soins. Les médicaments restent abordables, souvent moins chers qu’en France, et les pharmacies italiennes prodiguent volontiers des conseils éclairés.
FAQ
Faut-il parler italien avant d’arriver à Rome ? Pas obligatoirement, mais fortement recommandé. Un niveau de base (A2) facilite grandement les démarches administratives et l’intégration sociale. De nombreux expatriés arrivent sans parler italien et apprennent sur place, mais cela rallonge significativement la période d’adaptation et limite les opportunités professionnelles.
Combien de temps faut-il pour obtenir la résidence ? Le processus complet prend généralement 2 à 3 mois entre le dépôt du dossier et la réception du certificat de résidence. La visite de contrôle à domicile intervient habituellement 3 à 6 semaines après la demande. Pendant cette période, le récépissé de demande fait office de justificatif provisoire.
Les écoles internationales sont-elles accessibles financièrement ? Les frais de scolarité varient considérablement : 5000-10000 euros annuels pour une école française ou internationale de bon niveau, jusqu’à 20000 euros pour les établissements les plus prestigieux. Les écoles publiques italiennes restent gratuites et de qualité variable, constituant une option viable pour les familles maîtrisant l’italien.
Rome est-elle une ville sûre pour les expatriés ? Globalement oui. La criminalité violente reste rare, mais les pickpockets sévissent dans les zones touristiques et les transports. Les quartiers résidentiels sont généralement très sûrs. Comme partout, la vigilance de base et le bon sens suffisent à éviter la majorité des problèmes.
