Niché entre déserts de sable ocre et montagnes vertigineuses, le sultanat d’Oman s’impose comme une destination de randonnée encore méconnue du grand public. Pourtant, ce pays du Moyen-Orient offre des paysages d’une diversité exceptionnelle qui rivalisent avec les plus beaux sentiers de la planète. Des sommets du Djebel Shams aux wadis luxuriants, en passant par les villages perchés traditionnels, randonner à Oman permet de découvrir une terre authentique où les traditions bédouines côtoient une nature préservée. Avec plus de 3 000 mètres d’altitude pour certains massifs et des températures clémentes entre octobre et avril, ce territoire constitue un véritable paradis pour les amateurs de trekking qui cherchent à sortir des sentiers battus.
Le sultanat présente l’avantage considérable d’être accessible et sécurisé, contrairement à d’autres destinations moyen-orientales. Les infrastructures touristiques se développent progressivement tout en respectant l’environnement naturel et culturel. Selon les données du ministère omanais du Tourisme, la fréquentation des sites de randonnée a augmenté de 45% entre 2019 et 2023, témoignant d’un intérêt croissant pour cette forme de tourisme durable. Les randonneurs y trouvent une hospitalité légendaire, des paysages grandioses et une authenticité rare.
Les montagnes omanaises offrent des contrastes saisissants : gorges profondes sculptées par l’érosion, plateaux désertiques balayés par le vent, oasis verdoyantes nichées au creux des vallées. Cette géologie exceptionnelle résulte de millions d’années de mouvements tectoniques qui ont façonné des reliefs spectaculaires. Pour les passionnés de géologie et de photographie, chaque sentier révèle des formations rocheuses uniques, des teintes changeantes selon l’heure du jour et une lumière incomparable qui enflamme les falaises au lever et au coucher du soleil 🌅
Le Djebel Shams
Culminant à 3 009 mètres d’altitude, le Djebel Shams (littéralement « montagne du Soleil ») représente le point culminant d’Oman et de toute la péninsule arabique. Cette montagne majestueuse domine le massif du Hajar occidental et offre des panoramas vertigineux sur le Wadi Ghul, surnommé le « Grand Canyon d’Oman ». Les températures au sommet peuvent chuter jusqu’à 0°C en hiver, créant un contraste saisissant avec la chaleur des plaines désertiques situées quelques dizaines de kilomètres plus loin. Le sentier du Balcony Walk constitue la randonnée emblématique de ce massif, serpentant sur une corniche aérienne à flanc de falaise avec des dénivelés impressionnants de plus de 1 000 mètres sous vos pieds.
Cette randonnée de difficulté moyenne s’étend sur environ 6 kilomètres aller-retour et nécessite entre 3 et 4 heures de marche. Le sentier démarre depuis le village abandonné de Sab Bani Khamis, dont les ruines en pierre témoignent de la vie rude que menaient les habitants dans ces montagnes inhospitalières. Le chemin suit une ancienne voie de transhumance utilisée par les bergers pour déplacer leurs troupeaux entre les pâturages d’altitude et les vallées. Les randonneurs expérimentés apprécieront les passages aériens et les points de vue spectaculaires sur les strates géologiques multicolores qui composent les parois du canyon. En fin de parcours, un village accroché à la paroi rocheuse apparaît comme par magie, habité par quelques familles qui perpétuent un mode de vie ancestral.

Les autorités omanaises ont aménagé le départ du sentier avec un parking et des panneaux d’information, mais le chemin reste sauvage et exigeant. Il est vivement recommandé de partir tôt le matin pour éviter la chaleur écrasante et bénéficier d’une lumière rasante qui magnifie les reliefs. Les photographes trouveront ici des opportunités exceptionnelles pour capturer des clichés spectaculaires, notamment depuis les nombreux promontoires naturels qui jalonnent le parcours. Certains trekkeurs choisissent de bivouaquer au sommet pour assister au lever du soleil, une expérience inoubliable qui nécessite toutefois une autorisation préalable et un équipement adapté aux températures nocturnes rigoureuses.
Les wadis
Les wadis constituent l’une des particularités géographiques les plus fascinantes d’Oman. Ces vallées encaissées, sculptées par des cours d’eau saisonniers, créent des microclimats où s’épanouissent une végétation luxuriante et des bassins d’eau cristalline. Le Wadi Shab figure parmi les plus spectaculaires et accessibles, situé à environ 140 kilomètres au sud de Mascate. Cette gorge étroite s’étend sur plusieurs kilomètres et culmine avec une cascade cachée dans une grotte, accessible après une marche aquatique rafraîchissante. Les parois calcaires atteignent par endroits 200 mètres de hauteur, créant des jeux d’ombre et de lumière qui transforment chaque recoin en tableau naturel.
La randonnée dans le Wadi Shab débute après une courte traversée en barque traditionnelle depuis le parking. Le sentier alterne entre passages rocheux, franchissements de gués et sections dans l’eau qui peuvent atteindre la taille selon les saisons. Cette aventure aquatique nécessite environ 2 à 3 heures aller-retour et convient aux familles avec enfants, à condition qu’ils sachent nager pour la partie finale. Les piscines naturelles turquoise invitent à la baignade dans une eau dont la température avoisine les 23°C toute l’année. Des dattiers, des acacias et des lauriers-roses bordent le cours d’eau, attirant une avifaune diversifiée dont des martins-pêcheurs et des aigles de Bonelli 🦅

Le Wadi Bani Khalid offre une alternative moins fréquentée mais tout aussi remarquable, situé dans la région orientale du pays. Ses bassins permanents alimentés par des sources souterraines permettent la baignade même pendant les mois les plus chauds. La randonnée remonte le cours d’eau sur environ 4 kilomètres jusqu’à des villages berbères préservés où le temps semble s’être arrêté. Les habitants, réputés pour leur hospitalité, proposent parfois du kahwa (café omanais) aux visiteurs de passage, accompagné de dattes fraîches. Cette immersion culturelle ajoute une dimension humaine à l’expérience de la randonnée, rappelant que ces montagnes et vallées demeurent habitées et vivantes.
D’autres wadis méritent le détour pour les randonneurs en quête d’authenticité : le Wadi Damm avec ses palmiers centenaires, le Wadi Tiwi et ses cultures en terrasses, ou encore le Wadi Arbeieen et ses cascades permanentes. Chacun possède sa propre personnalité géologique et botanique, créant une mosaïque de paysages qui justifie plusieurs semaines d’exploration. La meilleure période pour découvrir ces oasis s’étend de novembre à mars, lorsque les températures restent supportables et que les précipitations occasionnelles alimentent généreusement les cours d’eau.
Le Djebel Akhdar
Le Djebel Akhdar (montagne Verte) doit son nom à ses terrasses agricoles verdoyantes qui contrastent avec l’aridité environnante. Ce massif calcaire atteint 2 980 mètres d’altitude et bénéficie d’un climat plus frais qui permet la culture de fruits tempérés comme les roses, les grenades et les abricots. Les villages de Wakan, Misfat al Abriyeen et Birkat al Mawz constituent des points de départ idéaux pour des randonnées qui combinent découverte naturelle et culturelle. Les habitants ont développé au fil des siècles un système d’irrigation ingénieux appelé falaj, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, qui achemine l’eau des sources montagnardes vers les parcelles cultivées en contrebas.
La randonnée entre les villages de Wakan et Al Ayn s’étend sur environ 8 kilomètres et offre un condensé des paysages du Djebel Akhdar. Le sentier serpente entre falaises vertigineuses, terrasses cultivées et habitations traditionnelles en pierre et en pisé. Les points de vue sur la plaine désertique en contrebas, située 2 000 mètres plus bas, provoquent des sensations vertigineuses mémorables. Durant la saison de la récolte des roses (avril-mai), les champs se parent de teintes roses et l’air embaume d’un parfum enivrant. Les femmes récoltent les pétales à l’aube pour produire la fameuse eau de rose omanaise, exportée dans tout le Moyen-Orient pour ses propriétés cosmétiques et culinaires 🌹

Misfat al Abriyeen représente l’un des villages les mieux préservés d’Oman, avec ses ruelles étroites pavées, ses maisons ocre accrochées à la montagne et ses jardins en terrasses alimentés par le falaj. Plusieurs circuits de randonnée partent du village pour explorer les environs : la boucle de 3 heures vers les sources d’eau, l’ascension vers le plateau calcaire qui domine le site, ou la descente vers la palmeraie du wadi. Ces itinéraires permettent d’observer de près le système agricole traditionnel et de comprendre comment les communautés montagnardes ont su s’adapter à un environnement hostile. Certaines familles proposent désormais des hébergements en guesthouse, offrant une opportunité unique de partager le quotidien des habitants.
Les déserts de sable et leurs treks mythiques
Si les montagnes concentrent l’essentiel des randonnées, les déserts omanais offrent des expériences de trekking uniques pour les aventuriers expérimentés. Les Wahiba Sands (ou Sharqiya Sands), étendues de dunes ondulantes qui s’étirent sur 200 kilomètres, constituent le terrain de jeu des bédouins et des chameliers depuis des millénaires. Randonner dans ce désert nécessite une excellente condition physique et un guide local indispensable pour naviguer dans cet océan de sable où aucun repère stable n’existe. Les dunes atteignent parfois 100 mètres de hauteur et leurs crêtes effilées par le vent créent des lignes graphiques spectaculaires sous la lumière rasante du matin ou du soir.
Les treks dans les Wahiba Sands s’organisent généralement sur 2 à 4 jours, avec des bivouacs sous les étoiles et l’accompagnement de dromadaires pour transporter l’équipement. Ces expéditions permettent de rencontrer les familles bédouines semi-nomades qui perpétuent un mode de vie ancestral basé sur l’élevage caprin et la connaissance intime du désert. Autour du feu de camp, les guides partagent leurs récits de traversées, leurs techniques de navigation stellaire et leur savoir sur les plantes médicinales du désert. La nuit, le spectacle céleste se révèle dans toute sa splendeur : la Voie lactée traverse le ciel d’un horizon à l’autre, et les étoiles filantes strient régulièrement l’obscurité. Ces moments de contemplation procurent une connexion profonde avec les éléments et un sentiment d’humilité face à l’immensité.

Le Rub al-Khali (le Quart Vide), plus grand désert de sable au monde, couvre la partie occidentale d’Oman avec des dunes qui peuvent atteindre 300 mètres de hauteur. Les expéditions dans cette région extrême restent réservées aux trekkeurs aguerris accompagnés d’équipes logistiques importantes. Les températures estivales dépassent régulièrement 50°C, rendant toute activité dangereuse entre mai et septembre. En revanche, l’hiver offre des conditions idéales avec des journées autour de 25°C et des nuits fraîches. Les paysages lunaires du Rub al-Khali, ses lacs salés asséchés et ses formations dunaires gigantesques créent une atmosphère extraterrestre qui fascine photographes et aventuriers en quête d’absolu.
La côte et les montagnes du Dhofar
La région du Dhofar, dans le sud d’Oman, présente des caractéristiques uniques en raison de l’influence de la mousson indienne (khareef). Entre juin et septembre, alors que le reste du pays étouffe sous la chaleur, les montagnes du Dhofar se couvrent d’une brume fraîche et d’une végétation verdoyante qui transforment le paysage en prairie alpine. Cette période attire des milliers de visiteurs omanais et des pays du Golfe qui fuient les températures caniculaires. Les randonnées dans le Djebel Qara révèlent des grottes karstiques, des cascades temporaires et une biodiversité exceptionnelle avec des espèces endémiques de plantes et d’oiseaux.
Le site archéologique d’Al Balid, près de Salalah, constitue le point de départ de plusieurs sentiers côtiers qui longent des plages désertes bordées de cocotiers et de mangroves. Ces écosystèmes abritent des tortues marines venues pondre, des dauphins qui chassent près du rivage et plus de 200 espèces d’oiseaux migrateurs. La randonnée jusqu’aux ruines de Sumhuram, ancien port de commerce de l’encens inscrit au patrimoine mondial, combine intérêt historique et beauté naturelle. Les vestiges témoignent de l’importance stratégique d’Oman dans les routes commerciales antiques qui reliaient l’Arabie, l’Inde et l’Afrique de l’Est 🏛️

Les wadis du Dhofar offrent un visage radicalement différent de ceux du nord : Wadi Darbat avec son lac permanent et ses cascades, Wadi Hinna et ses piscines naturelles entourées de palmiers, ou encore l’impressionnant gouffre de Tawi Attair (le « puits des oiseaux ») profond de 211 mètres. Ces sites nécessitent parfois des autorisations spéciales et l’accompagnement de guides agréés en raison des risques géologiques ou de la présence d’espèces protégées. La richesse naturelle du Dhofar justifie la création de plusieurs réserves naturelles où la randonnée s’accompagne d’une sensibilisation à la préservation de la biodiversité.
Conseils pratiques et équipement
Randonner à Oman exige une préparation minutieuse et un équipement adapté aux conditions climatiques extrêmes. L’hydratation représente la priorité absolue : comptez minimum 3 à 4 litres d’eau par personne et par jour de randonnée, davantage pour les treks en altitude ou dans le désert. Les systèmes de filtration d’eau restent inutiles car les sources naturelles sont rares et souvent salines. Les chaussures de randonnée robustes avec semelles antidérapantes s’avèrent indispensables sur les terrains rocheux et abrupts. Prévoyez également des sandales de marche aquatique pour les passages dans les wadis, ainsi qu’un sac étanche pour protéger vos affaires électroniques.
La protection solaire doit être maximale : crème indice 50+ à renouveler toutes les deux heures, chapeau à large bord, lunettes de soleil catégorie 4 et vêtements techniques couvrants qui protègent des UV tout en évacuant la transpiration. Les vêtements doivent respecter les codes vestimentaires locaux : épaules et genoux couverts, particulièrement lors des passages dans les villages traditionnels. Un foulard léger protège la nuque et peut servir de protection contre le sable lors des vents de désert. La trousse de premiers secours devrait inclure des pansements anti-ampoules, un désinfectant, des antalgiques et un traitement contre les troubles digestifs fréquents lors des changements d’alimentation.
Concernant la logistique, la location d’un véhicule 4×4 s’impose pour accéder à la plupart des départs de randonnées, les routes goudronnées laissant rapidement place à des pistes caillouteuses. Le permis de conduire international est obligatoire et l’assurance tous risques fortement recommandée. Certaines zones comme le Djebel Akhdar nécessitent une autorisation spéciale délivrée par le gouvernorat ou un accompagnement obligatoire par une agence locale. Les applications GPS fonctionnent correctement mais téléchargez les cartes hors-ligne car la couverture réseau reste aléatoire en montagne. Un téléphone satellite peut sauver des vies lors d’expéditions dans des zones reculées comme le Rub al-Khali.
Quand partir et considérations culturelles
La meilleure saison pour randonner à Oman s’étend d’octobre à avril, avec des températures diurnes agréables entre 20 et 30°C et des nuits fraîches voire froides en altitude. Janvier et février offrent les conditions optimales avec un ensoleillement maximal et des risques de précipitations minimaux. Attention toutefois aux crues subites dans les wadis après de rares mais violentes averses orageuses, particulièrement entre décembre et mars. Ces phénomènes peuvent transformer un cours d’eau paisible en torrent dévastateur en quelques minutes. Consultez toujours les prévisions météorologiques et interrogez les habitants locaux avant de vous engager dans une gorge étroite.

Le mois de ramadan impose certaines adaptations : évitez de manger, boire ou fumer en public pendant les heures de jeûne (du lever au coucher du soleil). Les horaires des restaurants et commerces sont modifiés, et certains sites touristiques peuvent fermer temporairement. Cette période spirituelle offre néanmoins l’opportunité d’assister à des traditions culturelles authentiques et de partager l’iftar (rupture du jeûne) avec des familles omanaises particulièrement accueillantes. Les guides locaux réduisent souvent leur activité pendant le ramadan, il est donc préférable de planifier vos randonnées en dehors de cette période mobile du calendrier lunaire.
Le respect des coutumes locales garantit des interactions harmonieuses avec les populations rencontrées sur les sentiers. Demandez toujours l’autorisation avant de photographier des personnes, particulièrement les femmes. Acceptez avec reconnaissance l’hospitalité proposée (café, dattes) mais déclinez poliment si vous souhaitez poursuivre votre route. Ne pénétrez pas dans les propriétés privées sans y être invité, même si les portes semblent ouvertes. Les Omanais pratiquent un islam modéré et tolérant mais apprécient que les visiteurs respectent leurs valeurs. Un comportement approprié ouvre les portes et enrichit considérablement l’expérience de la randonnée par des rencontres authentiques et des échanges culturels mémorables.
